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Page:Histoire de l'Académie Royale des Sciences et des Belles Lettres (1746).djvu/30

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Laërce[1] : ἀρχὴν καὶ ϛοιχείον τὸ ἄπειρον, que l’Infini etoit le principe & l’elément de toutes choses, sans doute pour faire comprendre que l’Etre infini s’etant confondu avec l’elément de l’eau, en avoit separé la substance pour la production des corps.

Anaximene son disciple[2] abandonna l’eau, & mit en sa place l’air, qu’il reconnoit avec l’infini pour principe de toutes choses. Il me semble cependant qu’il s’est fait une idée trop grossiere & trop materielle de cet ἄπειρον, puisqu’il soutient, que cet infini etoit d’une nature aërienne, ou l’Ether même, ou plutôt l’air rendu fécond par la substance infinie. On peut concilier par ces dernieres paroles, Plutarque avec Diogene Laërce, qui dit[3], en parlant d’Anaximene, ἀρχὴν ἀέρα ἐιπε καὶ τὸ ἄπειρον, c’est à dire, qu’il établissoit l’air & l’infini pour principe de toutes choses.

Anaxagore Disciple d’Anaximene, & comme quelques uns le pretendent, son successeur dans l’École Jonique, fit, selon les apparences, des reflexions plus mûres & plus solides sur l’infini corporel, τὸ ἄπειρον : Il reconnut que la matiere ne pouvoit être susceptible d’une division à l’infini, sans être totalement aneantie ; il crut donc rendre la chose plus intelligible en supposant que les particules de la matiere, aprés avoir demeuré ensemble pêle-mêle pendant un tems infini, avoient ensuite été separées & mises en ordre pour former les divers corps que l’univers contient. Plutarque remarque qu’il appelloit ces parties homogenes de la matiere qui s’etoient rassemblées, ὁμοιομερείας, ce que Ciceron rend[4] par le mot de particulas similes. Lucrece en donne une idee assez nette dans les vers suivans[5] :

  1. Lib. 2. sub init.
  2. Plutarq. L. 1. c. 3.
  3. in Vit. Anaximen.
  4. Tuse. Quast. IV. 118.
  5. Lucrec. I. p. 830.