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s’étendit peu à peu à la plupart des monastères de la Savoie relevant de l’ordre de Saint-Benoît.

A dater de cette époque, les traditions s’effacent ; l’histoire des couvents perd sa noblesse. Les religieux s’habituèrent à vivre sans l’abbé, et l’abbé sans les religieux. De là, une multitude de moines vivant dans l’anarchie et les désordres qui l’accompagnent ; de là, le scandale déplorable d’une foule de clercs séculiers, pourvus d’abbayes qu’ils que connaissaient que de nom et dont ils dévoraient la substance dans le luxe d’une vie mondaine, se couvrant d’un opprobre qui rejaillissait sur la religion[1] ; de là aussi, de fréquentes mutations de bénéfices de la part d’abbés, s’inquiétant peu des statuts de leur Ordre, ce qui amena le pape Eugène IV à défendre, par une bulle de 1438, qu’aucun abbé de l’ordre de Cîteaux ne résigna sa charge sans le consentement du chapitre général, à moins que la résignation ne se fît dans les mains du pape et en consistoire[2].

Les chefs de l’Ordre voulurent tenter un nouvel effort pour le relever d’un si grand abaissement. Réunis en chapitre général (1473), ils déléguèrent vers la cour de Rome l’abbé de Cîteaux pour la conjurer de remédier à ces maux et spécialement d’abolir la commende.

Le retour à la complète observation de la règle primi-

  1. L’oubli de la règle avait également pénétré dans les monastères de femmes. Jean, abbé de Cîteaux, et le chapitre général adressèrent des lettres à l’abbé d’Aulps, le 14 septembre 1433, pour le charger de faire prendre aux religieuses cisterciennes de la Savoie et du Dauphiné, le scapulaire réglementaire au lieu du manteau qu’elles portaient, et de faire couper la queue de leur robe, « car elles n’ont aucun scapulaire ains portent avec pompes des queues superflues en leurs manteaux et tuniques. » (Inventaire de l’abbaye d’Aux.)
  2. Archives du Sénat, Invent. de l’abb. d’Aux.