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tième jour du mois d’août de l’année suivante, vers les neuf heures du matin, il rendit le dernier soupir dans sa chère retraite de Clairvaux, entouré de Gozevin, supérieur général de l’Ordre, de plusieurs autres abbés et prélats, et de l’immense foule de religieux que sa réputation avait groupés autour de lui. Il était âgé de 63 ans. Depuis quarante ans, il était consacré à Dieu, et il avait gouverné l’abbaye de Clairvaux pendant trente-huit ans.

Un biographe contemporain rapporte que, peu d’instants avant sa mort, entendant les gémissements de ses religieux, il s’écria : « Je ne sais auquel des deux il faut me rendre, ou à l’amour de mes enfants qui me pressent de rester ici-bas, ou à l’amour de mon Dieu qui m’attire en haut. » Ce furent ses dernières paroles. Elles témoignent de ce qu’il fut toute sa vie : une âme ardente vouée à Dieu, mais aimant passionnément ses frères de la terre.

On ne peut calculer le nombre de ses disciples. Combien y en eut-il qui moururent avant lui, et combien d’autres étaient, au moment de sa mort, disséminés dans les nombreux monastères de son Ordre ? À Clairvaux seul, on en comptait alors sept cents ; population de sept vastes monastères et qui n’offre d’exemple que dans les agglomérations monastiques des premiers siècles de l’Église. Parmi ses disciples, on en vit un devenir chef de la chrétienté, Eugène III ; six, devenir cardinaux ; cinq, archevêques ; vingt-trois, évêques : et un bien plus grand nombre refusèrent les hautes dignités auxquelles ils étaient appelés.

On comptait jusqu’à cent soixante monastères affiliés à Clairvaux. La moitié environ ètait l’œuvre directe de saint Bernard, qui les avait lui-même fondés ou adoptés. Le territoire de la France actuelle en possédait vingt-sept, dont