nés ; je voudrais qu’ils vous eussent fait prisonnier, afin de leur faire rendre ce qu’ils ont perdu : je suis bien aise de ce que le roi est irrité contre vous, car il ne pourra faire de mal ni à vous ni à vos enfans. Le duc Aymon dit : Dame vous avez raison ; je vous promets dorénavant de ne leur plus faire aucun mal.
Après que Regnaut et ses frères eurent été long-temps
en la forêt des Ardennes, ils commencèrent
à marcher ; ils n’osaient aller dans les villes pour
acheter des vivres ; ils étaient cependant bien
pressés par la faim et le froid à cause des neiges,
la plupart de leurs gens mouraient. Regnaut et ses
frères en échappèrent, et ils n’avaient plus que
quatre chevaux, Bayard et trois autres ; ils n’avaient
ni blé ni avoine à leur donner, et ils ne vivaient
que de racines, par quoi les chevaux étaient si
maigres, qu’à peine pouvaient-ils aller, excepté
Bayard qui se portait bien, car il vivait mieux avec
des racines que les trois autres avec de l’avoine.
Les quatre vaillans fils Aymon menèrent longtemps
cette vie malheureuse : leurs harnais étaient enrouillés,
leurs selles et leurs brides pourries ; ils
étaient devenus tous noirs et velus. Regnaut avait