Page:Hobbes - Œuvres philosophiques et politiques (trad. Sorbière), 1787.djvu/251

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nous apprennent que l’éloquence ne regarde pas à la vérité comme à son but (si ce n’est par accident), mais à la victoire ; et que sa profession n’est pas d’enseigner les hommes, mais de les persuader.


XII. La troisième raison pour laquelle j’estime qu’il soit moins utile de délibérer en une grande assemblée est que, de là, se forment des factions dans l’État, et des factions, naissent les séditions et les guerres civiles. Car, lorsque deux orateurs, d’égale réputation, se rencontrent à soutenir des opinions diverses, celui qui succom­be prend en haine celui qui emporte le dessus, et en même temps tous ceux qui se laissaient toucher aux raisons de son adversaire, comme s’ils avaient méprisé les siennes. Ensuite de quoi il tâche de faire mal réussir les délibérations et ne se soucie point qu’elles tournent en dommage de la république ; parce qu’il lui semble que par ce moyen il recouvre en quelque sorte son honneur, et diminue la gloire de son antagoniste. D’ailleurs, lorsque les suffrages n’ont pas été tellement inégaux, qu’il ne reste encore quelque espérance aux vaincus de pouvoir faire qu’en une autre assem­blée, revoyant l’affaire, si l’on gagne quelques personnes, on prendra une nouvelle délibération ; alors, dis-je, les principaux du parti s’assemblent et consultent en parti­culier, comment c’est qu’ils pourront faire changer la résolution précédente ; ils font dessein de se trouver tous des premiers