Page:Hobbes - Léviathan - Tome I.djvu/156

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
— 101 —

première, c’est-à-dire l’Imagination sans l’aide du Jugement ne mérite pas le titre de Vertu ; mais la seconde qui est le Jugement, et la Discrétion, tire sa valeur d’elle-même sans avoir besoin du secours de l’Imagination[1]. Outre la Discrétion des moments, des lieux et des personnes, sans laquelle une Imagination ne saurait avoir de prix[2], il faut aussi une fréquente application des pensées à leur Fin [c’est-à-dire à l’usage qu’on doit en faire] ; dès lors, celui qui possède une telle Vertu ne manquera pas de similitudes, qui ! plairont non seulement en illustrant son discours et en l’ornant[3] de métaphores nouvelles et appropriées, mais qui plairont aussi par la rareté de leur invention[4]. Mais, sans Fermeté et sans Direction vers quelque fin[5], une grande Imagination est une sorte de Folie ; et c’est là le genre d’Imagination qu’ont ceux qui, lorsqu’ils entreprennent un discours, sont entraînés loin du but qu’ils se proposent par tout ce qui vient en leur pensée [6] en de si nombreuses et si longues digressions et Parenthèses qu’ils s’égarent complète-

  1. La phrase à partir de : « La première… » est remplacée dans le texte latin par : « On apprécie rarement l’imagination sans jugement ; mais le jugement ou discrétion tire sa valeur de lui-même, sans le secours de l’imagination ».
  2. « necessary to a good Fancy » en anglais ; « quæ laudari faciant Phantasiam » en latin.
  3. Le membre de phrase à partir de « qui plairont… » est remplacé dans le texte latin par : « pour illustrer son discours et l’orner ».
  4. Le latin dit : « mais pour plaire aussi par la rareté de l’invention ».
  5. Le latin dit : « Cependant, s’il n’y a pas une direction constante des pensées vers quelque fin ».
  6. Le latin dit : « presque par chaque pensée étrangère ».