Page:Hobbes - Léviathan - Tome I.djvu/76

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
— 21 —

Ainsi s’ensuivit aisément cette question malicieuse[1]. Tout cela en un instant, car la Pensée est rapide[2].

L’Enchaînement de Pensées réglé. — La seconde sorte de discours mental est plus constante, en ce sens que l’enchaînement de pensées est réglé par quelque désir, quelque dessein. L’impression faite par les choses que nous désirons ou craignons est en effet forte et durable, ou (si elle cesse pour un temps) elle ne tarde pas à revenir ; elle est si forte parfois qu’elle trouble et interrompt[3] notre sommeil. Du Désir naît la Pensée des moyens que nous avons vu produire précisément un résultat semblable à celui que nous désirons ; et de cette pensée naît celle des moyens pour parvenir à ces moyens ; et ainsi de suite jusqu’à ce que nous arrivions enfin à quelque chose qui soit en notre pouvoir. Et, parce qu’en raison de la grandeur de l’impression, le But se présente souvent[4] à l’esprit, si nos pensées commencent à errer, elles sont rapidement ramenées dans la bonne voie : ce fait observé par

  1. Le latin ajoute : « dont nous avons parlé ».
  2. Le passage à partir de « Dans une conversation » est ainsi traduit par G. Lyon d’après le texte anglais (G. Lyon La Philosophie de Hobbes, Paris, Alcan, 1893, page 103) « Dans une conversation sur notre présente guerre civile, quelle question pouvait sembler plus impertinente que de demander, comme on fit, ce que valait le penny romain ? Néanmoins la liaison me fut assez manifeste. Car la pensée de la guerre fit songer à l’abandon du roi livré à ses ennemis ; cette pensée suscita celle de la trahison du Christ cette dernière à son tour celle des trente pence, prix de la trahison d’où suivit aisément cette malicieuse question et tout cela dans la durée d’un instant, car la pensée est prompte ».
  3. Le latin dit : « que non seulement elle trouble, mais interrompt ».
  4. Le latin dit : « revient souvent et facilement ».