Page:Hoche, Le faiseur d'hommes et sa formule, Librairie Félux Juven, 1906.djvu/87

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neuse du haut, en bas. Celle-ci de plus en plus amorphe — je tiens à le déclarer pour ma justification — avait complètement cessé de me donner la sensation d’un être vivant. Déjà, me souvenant de ce qui s’était passé dans la jungle et goûtant cette absurde vanité qui magnifie les gestes didactiques — la propre vanité du pion et du cuistre d’amphithéâtre — j’annonçais par avance à Yvonne les phases des étranges phénomènes qui allaient se produire sous ses yeux quand une sorte de rauquement strident et sauvage éclata derrière nous.

Me tournant, je vis une forme grisâtre se faufiler parmi les arbres : l’être sans doute que j’avais entendu marcher derrière nous. Mais il nous tournait le dos et, dans la pénombre, avait l’air de s’éloigner plutôt que d’avancer, ce tout en meuglant à fendre l’âme.

Très fine, avec son intuition habituelle de l’imminent, toutes les fois que cet imminent sort de la norme, Yvonne, la première, sentit une menace dans l’air. Elle me demanda si je n’étais pas d’avis de quitter immédiatement le théâtre de mon triste exploit. Mais je la rassurai en ricanant, et en émettant l’opinion que le monstre en fuite s’était fait peur à lui-même avec ses cris d’orfraie. Elle insista cependant