Page:Hoefer - Biographie, Tome 26.djvu/420

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parvînmes de nuit , quoiqu’il nous fallût deux fois descendre à terre dans le pays de nos ennemis ». Joinvilie se plaît à rappeler la fermeté d’âme que montra la reine au milieu des périls quand elle était renfermée à Damiette. En quittant l’Egypte saint Louis fit embarquer Joinvilie sur son vaisseau , où était aussi la reine Marguerite. C’est dans ce voyage que le plus faible des vents, selon l’expression employée par saint Louis, faillit noyer, près des rivages de Chypre, le roi de France avec toute sa famille. Un jour que la mer furieuse menaçait de faire sombrer le navire, la reine Marguerite fit vœu à saint Nicolas de Yarangeville d’une nef d’argent, et Joinvilie s’engagea à porter lui-même cette offrande à pie et des chaux dans l’église du saint au diocèse de Chàlons. Il accomplit ce vœu en mai 1255.

Avec les périls de la navigation la piété de Joinvilie semble s’accroître. Un écuyer tombe à la mer, et sur le point de se noyer invoque Notre-Dame, qui le soutient par les épaules et le ramène à bord. « En l’onneur de ce miracle, dit-il , je l’ay fait peindre à Joinvilie , en ma chapelle, et es verrières de Blécourt. » Mais jamais, dans les plus grands périls la gaieté gauloise ne l’abandonne. Sur le point de sombrer au fond de la mer, il raconte la naïveté d’un sien écuyer qui lui jeta un manteau sur les épaules, dans la crainte qu’il ne prît froid et s’enrhumât.

En 1254, après une ahsence de six ans , Joinvilie revit enfin son château bien aimé , sa femme Alaïs, et son fils, âgé alors de six ans. Il s’arrêta quelque temps à Joinvilie pour arranger ses affaires , fort délabrées , ne s’ étant réservé que mille livres de revenu lors de son départ pour la croisade, d’où il revenait ayant tout perdu : il se rendit ensuite auprès du roi à Soissons, « qui lui fist si grant joie que tous ceux qui là estoient s’en émerveilloient ». Le roi lui donna alors la terre de Gernzei, à la charge de l’hommage lige. L’un de ses premiers soins fut d’aller visiter les tombeaux de ses aïeux à Clairvaux , et d’y faire inscrire les épitaphes de ses prédécesseurs, seigneurs de Joinvilie, inhumés au cimetière des nobles dans cette abbaye. Il fit aussi placer dans l’église de Saint Laurent, au-dessus du tombeau de son oncle Geoffroy Troui!lard, Vescusson escartelé des armes d’Angleterre qu"il avait rapporté de Saint-Jeand’Acre (l). Peu demois après son retour, il négocia le mariage de la filieduroi de France, Isabelle, avec son seigneur Thibaut Y, comte de Champagne et roi de Navarre , qui venait de succéder à son père. Des pièces déposées aux archives indiquent qu’il reçut quelques possessions ajou- (1) Au mois de mai 1257 , le roi de Castille, en récompense des services que Joinvilie avait rendus à la foi chrétienne durant la croisade, lui fit don de mille marcs d’argent au grand marc : la patente authentique lui en fut envoyée par l’archidiacre de Maroc. tées à ses fiefs , probablement en récompense : cette union.

Sa mère mourut en 1260. Il hérita d’elle plusieurs domaines, et, selon les lettres datt de 1261, il retint dans sa mouvance ce»| ( passèrent à son frère Geoffroy de Vaueouleu L’abbaye de Saint-Urbain, enclavée dans s domaine de Joinvilie, se trouvant sans abbé, j suite d’un conflit entre plusieurs prétendan’ Joinvilie s’en attribua la garde ; ce qui occasior . un grand tribouil, dans un parlement à Parj entre Joinvilie, l’évêque Pierre de Flandre, comtesse Marguerite de Flandre et l’arche que de Reims. A cette occasion Joinvilie fut i communié par l’évêque de Chàlons. Les évêqi intervinrent dans ce débat, reprochant à sa Louis de protéger les spoliateurs de l’Égli I mais le roi les éconduisit par de bonnes paroi,: quoique avec un peu d’ironie, comme il fit à 1 chevêque de Reims. Quant à l’évêque de Châloj voici comment le roi s’y prit : « L’évêque Chàlons lui ayant dit : Sire , que ferez-vous seigneur de Joinvilie, qui toit à ce pauvre ino Pabbaye de Saint-Urbain? — Sire évesque, le roy, entre vous avez establi que l’on ne < oyr nul escommunié en cour laie, et j’ai ve lettres scellées de trente-deux sceaux que v< je ne vous escouteray jusques à tant que < soyez absoutz. » C’est ainsi, ajoute Joinvil que par son senz il le délivra de ce q avoit à faire.

En 1261, Joinvilie épousa en secondes no Alix, fille de Gauthier, seigneur de Resnel Bassigny, et par cette alliance il réunit c< baronnie à celle de Joinvilie. En 1262 il «  plit un service de cour aux noces du prii Philippe ( depuis Philippe III le Hardi) et < sabelle d’Aragon. Une lettre de Thibaut , ! seigneur, contient même à ce sujet un déi assez curieux : Joinvilie réclamait à son pr* la remise des écuelles qui avaient servi au pas, comme un droit relevant de sa charge; m sa demande fut rejetée , attendu que ces écu les étaient celles du roi de France, dont Jo ville n’était pas le vassal : ce qu’il n’aui pas dû oublier, puisqu’il avait refusé de prê serment à saint Louis lors de son départ pour croisade, attendu qu’il était homme lige deT baut , comte de Champagne, et non celui du i de France.

Malgré le bonheur dont il jouissait auprès sa famille, et le soin qu’il apportait au bien-êt de ses vassaux, Joinvilie quittait souvent I château pour se rendre auprès du roi Louis I dont il admirait les vertus et qui répondait à I dévouement par une tendre affection. Souve Joinvilie partageait avec monseigneur de Ne.’ et Jean, comte de Soissons, le soin que le i leur confiait d’aller en tendre les plaids aux port du palais, et de l’informer des affaires qui r clamaient sa présence; il s’asseyait même pr du roi quand saint Louis rendait la justice , s<