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LANSEL - LANTARA

LANSEL ou LANSSELIUS (Pierre), érudit flamand, né eu 1580, à Gravelines, mort le 16 août 1632, à Madrid. Admis de très-bonne heure dans la Société de Jésus, il s’appliqua à l’étude des langues orientales ainsi qu’à la critique sacrée et parcourut l’Allemagne, dont il explora avec soin les plus riches bibliothèques. Sa réputation d’érudit était si bien acquise que Philippe IV, roi d’Espagne, l’appela à Madrid pour y occuper une chaire d’hébreu. On a de lui : S. Dionysii Areopagitae Opera omnia quae exstant ; Paris, 1615, in-fol., édition reproduite dans la Bibliotheca magna Patrum, t. Ier, et à laquelle Lansselius a ajouté d’anciennes scolies grecques et une Disputatio apologetica sur la vie et les écrits de Denys ; — Biblia sacra Vulgatae editionis Sixti V ; Anvers, 1624-1625, 2 vol. in-fol. ; supplément au scolies de Jean Mariana et d’Emmanuel Sa, augmenté des Correctiones de François Luc, de Bruges ; — Dispunctio Calumniarum quae S. Justino martyri inuruntur ab Isaaco Casaubono ; Paris, 1636, in-fol. K.

Sotwel, Biblioth. Scriptorum Soc. Jesu. — Jöcher, Allg. Gelchrten-Lexikon.

LANTARA (Simon-Mathurin), célèbre peintre et dessinateur français, né à Oncy, près Milly, le 24 mars 1729, mort à l’hôpital de la Charité de Paris, le 22 décembre 1778[1]. Il était fils de Françoise Malvilain, fille non mariée ; mais, à la suite d’un procès difficile, l’enfant fut reconnu par Simon-Mathurin Lantara, ouvrier tisserand, qui épousa Françoise Malvilain, le 25 février 1732[2]. II ne reçut dans son enfance d’autres leçons que celles du magister de son village, et cette première instruction s’arrêta bien vite ; car à l’âge de huit ans, ayant perdu sa mère, le jeune homme fut contraint d’abandonner l’école et d’entrer comme gardien de bestiaux au château de La Renommière, appartenant à Pierre Gillet, échevin de la ville de Paris. Ce fut dans cette fraîche campagne, au milieu de sites pittoresques et gracieux, que le jeune pâtre sentit se révéler en lui ce goût de la représentation de la nature qui devait le placer au rang des premiers paysagistes. Bientôt la passion du peintre s’empara de Lantara : il traçait avec un bout de branche, sur le sable ou sur les rochers, le plan de ses tableaux agrestes qu’il nuançait ensuite avec des couleurs naturelles, des feuilles vertes, des brins de mousse, des petits cailloux. Un jour le fils du seigneur de La Renommière, M. Gillet de Laumont, étant venu au château de son père, fut frappé des dispositions artistiques du jeune vacher. Il l’emmena à Versailles, et le plaça chez un peintre dont on ne sait pas le nom : Lantara quitta ce premier maître pour entrer au service personnel d’un autre artiste de Paris, qui lui paya ses gages en leçons de peinture. Se sentant assez fort pour se passer de guide, Lantara quitta l’atelier, et vint se loger rue Saint-Denis dans une pauvre mansarde, d’où il pouvait à peine entrevoir le ciel. Il travaillait peu et rêvait beaucoup. Dans sa maison était une fruitière nommée Jacqueline, fille d’une marchande aux halles, qui chantait plus qu’elle ne vendait. La mansarde et le rez de chaussée firent bientôt connaissance ; tous deux jeunes, insouciants et pauvres, ils associèrent leur gaité et leur misère. Avec son talent et son heureuse facilité, Lantara eût pu acquérir de l’aisance ; mais artiste par le génie, il l’était aussi par la paresse, et la pauvreté était la véritable muse inspiratrice du paysagiste. Puis, enfant de la nature, il ne dessinait jamais si bien qu’en bras de chemise et sans cravate. Ce laisser-aller ne pouvait lui faire trouver de protecteurs ; il ne plaçait donc ses productions qu’à des marchands et à vil prix. Pour son complet malheur, Jacqueline mourut ; c’était la seule personne dont il eût été compris et aimé. Il ne chercha pas à se remarrier : il se mit à hanter le cabaret pour oublier un amour aussi constant que sincère. Cependant Lantara ne fut point le bohème, le fainéant, l’ivrogne qu’il a plu aux vaudevillistes de mettre en scène, Assurément il allait au cabaret ; mais il y allait pour prendre ses modestes repas, comme la majeure partie des écrivains et des artistes de son temps. Alexandre Lenoir, qui l’avait connu, le montre pauvre et heureux dans sa misère ; des crayons, sa palette, ses pinceaux et une huppe qu’il chérissait, formaient tout son mobilier, « Avec de grands talents il avait l’insouciance et la naïveté d’un enfant. Ce Lantara, ajoute-t-il, avait les bonnes et les mauvaises qualités d’Arlequin ; il était, comme le Bergamasque, naïf, spirituellement bête et habilement maladroit. » Il le peint plus gourmand qu’ivrogne. Il aimait mieux une bavaroise au chocolat qu’une bonteille de vin, et tous ceux qui l’entouraient abusaient de ce défaut et de son insouciance en lui faisant faire des dessins, même des tableaux, pour un dîner, un gâteau d’amandes, une tourte ou quelque friandise[3]. Quand il avait bien bu, bien mangé, il allait rêver dans les champs, sans souci de la gloire, ni de la fortune. Il aimait la splendeur des astres, les mystères du crépuscule et le silence de la nuit. « Souvent, dit M. Charles Blanc, on le voyait le soir, immobile sur le Pont-Texte en italique

  1. La plupart des biographes ont toujours parlé de cet artiste sans donner le moindre détail sur son existence. Les uns le font naître à Montargis ou à Challettes, village près de cette ville ; les autres lui donnent pour patrie Melun, Fontainebleau ou Achères. L’époque de sa naissance variait depuis 1710 jusqu’en 1745. Grâce aux recherches de M. Émile Bellier de La Chavignerie, nous pouvons donner sur Lantara des renseignements inédits et certains.
  2. M. Ch.-F. Lapierre, dans Les Hommes illustres de l’Orléanais, le fait fils d’un peintre d’enseignes et d’une marchande de toilettes. Le même écrivain le fait mourir à trente-trois ans.
  3. Alexandre Lenoir cite le limonadier Talbot, placé près du Louvre, comme ayant obtenu une belle suite de dessins de Lantara, dont il tira un grand bénéfice, avec les bavaroises et le café à la crème qu’il lui donnait à ses déjeuners.