Page:Hoffmann - Œuvres complètes, tome III.djvu/165

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que peut réussir l’opération que je vais entreprendre ! Suivez-moi. »

Les deux amis suivirent le docteur en traversant plusieurs chambres, où, sauf quelques animaux singuliers qui s’occupaient à lire, à écrire, à peindre, à danser, il n’y avait rien de bien extraordinaire, jusqu’à ce qu’une porte à deux battants s’ouvrit devant eux, et qu’ils se trouvèrent en face d’un épais rideau, derrière lequel disparut Prosper Alpanus, en les laissant dans une profonde obscurité. Ce rideau s’ouvrit bientôt après avec grand bruit, et les jeunes gens se virent dans une salle qu’ils jugèrent de forme ovale, autant que put le leur permettre le clair-obscur vaporeux et magique répandu dans l’air. Il semblait, en considérant les parois, qu’on plongeât ses regards dans un vaste horizon de vertes forêts, de prairies émaillées, rafraîchies par des sources et des ruisseaux murmurants. Les exhalaisons enivrantes d’un aromate inconnu circulaient par bouffées et semblaient propager les vibrations sonores de l’harmonica. Prosper Alpanus parût tout vêtu de blanc comme un brahmine, et il disposa au centre de la salle un grand miroir rond de cristal qu’il couvrit d’un crêpe.

« Balthasar ! dit-il d’une voix solennelle et concentrée, mettez-vous devant cette glace, et dirigez avec énergie votre pensée sur Candida. Veuillez de toutes les forces de votre âme qu’elle vous apparaisse immédiatement, à cet endroit, dans ce moment précis de l’espace et du temps ! »

Balthasar fit ce qui lui était prescrit, tandis que