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Page:Hoffmann - Œuvres complètes, tome III.djvu/410

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finissez ! ô gens ignorants et maladroits ! vous ne faites là qu’affaiblir et irriter en pure perte notre robuste et vaillant conseiller ! » À ces mots, il lança son turban dans le jardin par-dessus toutes les tètes, et le kaftan aprés. Puis il commença à décrire avec la main autour du conseiller aulique des cercles étranges qu’il rétrécissait graduellement, de telle sorte qu’à la fin il lui touchait presque les tempes et le creux de l’estomac. Puis il souffla son haleine sur le conseiller, qui ouvrit aussitôt les yeux et dit d’une voix faible : « Exter ! tu as eu tort de m’éveiller ! — Une puissance ténébreuse m’a annoncé ma fin prochaine, et peut-être m’était-il accordé de passer à mon insu de cette léthargie au sommeil de la mort.

» Sottises, rêveries ! s’écria Exter, ton heure n’est pas encore venue. Regarde seulement autour de toi, mon bon frère, vois où tu es, et redeviens joyeux comme il convient d’être. »

Le conseiller aulique s’aperçut alors qu’il se trouvait dans le salon en pleine compagnie. Il se leva vivement du canapé, fit quelques pas en avant, et dit avec un gracieux sourire : « Je vous ai donné là un méchant spectacle, mes honorables hôtes ! Mais il n’a pas dépendu de moi que ces maladroits me portassent autre part qu’ici. Hâtons-nous d’oublier ce fâcheux intermède : dansons ! » — La musique commença aussitôt ; mais au moment où tout le monde était occupé à se saluer révérencieusement dans le premier menuet, le conseiller aulique se glissa hors du salon avec Exter et Rixendorf.

Lorsqu’ils furent arrivés dans une chambre éloi-