Page:Hoffmann - Œuvres complètes, tome III.djvu/450

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en face de la maison ; quoiqu’on ne puisse s’y asseoir qu’en tournant le dos à la maison, je m’élance promptement pour y prendre place, et, me penchant sur le dossier, je puis contempler à mon aise la croisée mystérieuse.

Oui ! c’était elle, la jeune fille gracieuse, ravissante ! l’image de mon rêve. Seulement, son regard paraissait égaré. Ce n’était pas vers moi, comme je l’avais cru d’abord, qu’elle tournait les yeux, où semblait reposer la fixité de la mort. Bref, si le bras et la main ne s’étaient pas remués par moments, j’aurais pu croire que je voyais un portrait peint avec un merveilleux talent.

Tout entier absorbé dans la contemplation de cet étrange spectacle, qui me causait une émotion si profonde, je n’avais pas entendu la voix criarde du colporteur italien qui m’offrait ses marchandises peut-être depuis long-temps. Enfin, il me toucha le bras pour attirer mon attention. Je me retournai vivement et le chassai avec dureté. Mais il revint à la charge avec opiniâtreté et mille supplications. « Je n’ai encore rien gagné d’aujourd’hui, mon bon monsieur ! achetez-moi quelque chose : une couple de crayons, un paquet de curedents ! » À la fin, excédé de ses importunités, et pour me délivrer le plus tôt possible de sa présence, je tirai ma bourse de ma poche avec un mouvement d’impatience.

« J’ai encore ici de bien jolies choses ! » dit-il en ouvrant le tiroir inférieur de sa botte. Et il prit parmi d’autres objets un petit miroir de poche ovale qu’il tint à côté de moi à une certaine distance, et