Page:Hoffmann - Œuvres complètes, tome III.djvu/465

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rituel peuvent seuls nous ravir le courage et la force de sortir victorieux de la lutte. En un mot, c’est une maladie réelle de l’esprit — le péché qui nous rend sujets à la domination du principe satanique. N’est-il pas remarquable que depuis les temps les plus reculés, ce soit celle de nos affections, qui remue et ébranle notre être dans ses plus intimes profondeurs, qui ait donné aux esprits infernaux le plus de prise sur l’âme humaine. Je veux parler des enchantements amoureux dont toutes les vieilles chroniques sont remplies. Il n’est aucun procès de sorcellerie qui ne présente quelque bizarre incident de ce genre. Encore aujourd’hui même, dans le code d’un état des mieux policés, il est question des breuvages d’amour, auxquels sont attribuées en effet des vertus purement psychiques, puisqu’ils produisent non pas seulement une excitation de vagues désirs, mais encore une séduction irrésistible au profit d’une personne déterminée. Je me rappelle, à propos du sujet qui nous occupe, un événement tragique arrivé il n’y a pas fort long-temps, et dont ma propre maison fut le théâtre.

» À l’époque où les troupes de Bonaparte inondaient notre territoire, je fus chargé de loger un colonel de la garde d’honneur du vice-roi de Naples. Il était du petit nombre de ces officiers de la soi-disant grande armée, que distinguait une conduite sage, noble et modeste. La pâleur mortelle de son visage, ses yeux pleins de langueur semblaient dénoncer une grave maladie ou une affliction profonde. Peu de jours après son arrivée, se manifesta l’espèce