Page:Hoffmann - Œuvres complètes, tome III.djvu/683

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la sorcière, en culbutant les ustensiles fracassés, et faisant craquer la charpente du taudis. Et voilà comment tu fus soumis à cette onction funeste qui te fait endurer à chaque anniversaire de si cruels tourments.

BERGANZA.

Cette lutte intérieure semble pourtant devoir m’assurer une vie éternelle et une vigueur sans déclin, car je me réveille chaque fois de mon profond évanouissement réconforté et rajeuni d’une manière miraculeuse. La constellation particulière qui présida à ma naissance, et qui me dota de la faculté non-seulement de comprendre votre langage mais encore de m’en servir, est entrée en conflit avec cet enchantement diabolique, de telle sorte qu’à présent je cours le monde comme le juif errant, à l’épreuve des coups de bâton, du fusil et du poignard, et sans devoir trouver nulle part le repos de la tombe. Mon sort est vraiment digne de compassion ; et au moment où tu m’as rencontré, je venais de me sauver de chez un maître bourru, je n’avais rien mangé depuis le matin, et j’étais plongé dans les plus tristes réflexions sur ma bizarre destinée.

MOI.

Pauvre Berganza ! Plus je te considère de près à la clarté de la lune, plus je découvre dans ton visage, un peu noirâtre à la vérité, les traits d’une cordiale loyauté et d’une heureuse nature. Tes facultés oratoires mêmes, toutes surprenantes qu’elles soient,