Page:Hoffmann - Œuvres complètes, tome III.djvu/698

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serole qui résonna sur la dalle du seuil, se mit à rire à gorge déployée de ce spectacle, en se pressant les côtes de ses grosses mains rouges. Le nombre et la joie bruyante des assistants augmentaient de minute en minute ; les murs boisés, le plafond, retentissaient de fous éclats de rire à chaque gambade grotesque que j’exécutais comme un véritable paillasse. — Tout-à-coup je m’arrêtai, on crut que c’était de fatigue ; mais lorsque l’enfant fut mis à terre, je fis un grand bond, et puis je me couchai d’un air câlin aux pieds de la jeune fille aux boucles brunes.

« En vérité, mademoiselle Cécile ! dit en riant la grosse cuisinière, le chien a l’air de vouloir vous obliger à le monter. » Là-dessus, tous les domestiques, les bonnes, les femmes de chambre, de s’écrier en chœur : « Oui, oui ! ah le chien intelligent ! — le chien spirituel ! » — Une légère rougeur parcourut les joues de Cécile. Au fond de son œil d’azur pétillait l’envie de se passer ce plaisir d’enfant. — Faut-il ?… ne faut-il pas ?… semblait-elle se demander tout bas, en me regardant amicalement, le doigt appuyé sur sa bouche. Bientôt après elle était assise sur mon dos : alors je m’avançai, fier de mon charmant fardeau, au pas de la haquenée conduisant au tournoi sa royale maîtresse, et la troupe pressée des spectateurs se rangeant avec précipitation sur mon passage, je fis le tour du vestibule, comme au milieu d’un cortège triomphal. Tout-à-coup une grande et belle femme, d’un âge mûr, ouvrit la porte de l’antichambre, et arrêtant un regard fixe sur ma belle