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Page:Hoffmann - Œuvres complètes, tome III.djvu/758

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veloppement qui peuvent aisément passer aux yeux des gens incapables pour un remplissage inutile. En un mot, cher ami, rien que pour émonder un ouvrage de cette sorte d’une manière convenable et pour savoir mettre en relief le filon d’or qu’il renferme en le dégageant de toute scorie impure, je prétends qu’il faut déjà être soi-même un excellent poète, et avoir conquis par une longue pratique, par un goût éprouvé, le droit d’exercer les priviléges de cette maîtrise littéraire.

MOI.

Assurément, nos directeurs et régisseurs de théâtres ne songent guère à offrir pareille justification de leur compétence.— Cependant, il arrive parfois à tel médiocre auteur d’enfanter une œuvre dramatique qui par son allure énergique et franche ne peut manquer son effet sur la foule. Directeur et régisseur ont examiné l’ouvrage, ils ont vérifié et contrôlé ses dimensions de longueur, de largeur, d’épaisseur : mais quant au fond, ils l’ont déclaré d’un commun accord absurde et pitoyable. Néanmoins, comme d’habiles connaisseurs sollicitaient vivement la représentation, le drame est mis à l’étude, et mes gens de se frotter les mains à l’avance dans l’expectative des sifflets qui doivent l’accueillir suivant toute probabilité. Car le susdit régisseur avec une malicieuse perfidie a refusé au poète frappé de réprobation son aide providentielle, et le laisse braver les chances du sort dans son état de nudité primitive, dans le dénûment le plus complet de toutes les ressources