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Page:Hoffmann - Œuvres complètes, tome III.djvu/773

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interprétation me semble fort judicieuse, outre qu’elle est infiniment pittoresque. — En général, tu parais doué d’une grande vivacité d’imagination. Mais, tu me dois encore l’explication de ce que tu nommes des caractères bigarrés.

BERGANZA.

L’expression ne vaut pas grand’chose pour designer ce que je veux proprement dire. Toutefois, elle m’a été suggérée par l’aversion que m’inspirent toutes les créatures de mon espèce mouchetées de diverses couleurs. Plus d’un chien a senti mes dents s’imprimer sur ses oreilles, uniquement parce qu’avec sa robe mélangée de brun et de blanc il me faisait l’effet d’un méprisable fou au costume mi-partie. Or, cher ami, il y a parmi vous tant de gens appelés poètes, et dont l’on ne peut contester ni l’esprit, ni les moyens, ni même la sensibilité, mais que l’on voit, au sein des habitudes triviales de tous les jours, comme si la poésie n’était pas la vie elle-même du poète, s’abandonner servilement aux soucis les plus vulgaires et distinguer avec la plus stricte exactitude les heures du travail de bureau du reste de leurs affaires ! Ce sont des gens avares, égoïstes, mauvais époux, mauvais pères, amis inconstants, et cela ne les empêche pas de remplir la nouvelle feuille qu’ils rédigent pour l’imprimeur des maximes les plus saintes, parées d’un langage harmonieux et divin.