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Page:Hoffmann - Œuvres complètes, tome III.djvu/83

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et peu naturel, qu’on ne savait trop jusqu’à quel point cela pouvait être séant à une chanoinesse. Mais souvent, malgré cela, il y avait dans son regard tant de grâce et de bonté, surtout dans la saison des roses par un beau temps serein, que chacun à sa vue se sentait pénétré d’un charme aussi doux qu’irrésistible.

Lorsque j’eus le plaisir de voir la gracieuse demoiselle pour la première et dernière fois, elle me parut être une femme dans l’épanouissement le plus complet de la fleur de l’âge, à l’apogée de sa période solsticiale, pour ainsi dire, et je m’estimai fort heureux de l’avoir connue précisément à cette époque, où je fus en quelque sorte stupéfait de cette miraculeuse beauté, qui ne pouvait plus sans doute que décliner. J’étais dans l’erreur. Car les plus anciens du village déclaraient connaître l’honorable demoiselle depuis l’âge de raison, et certifiaient qu’elle n’avait jamais été différente de ce qu’elle était alors, ni plus vieille ni plus jeune, ni plus ni moins jolie. Le temps semblait donc n’avoir aucune puissance sur elle, et plus d’un pouvait déjà s’étonner beaucoup d’un pareil phénomène. Mais il y avait en outre plusieurs autres choses à propos desquelles, en y réfléchissant sérieusement, personne ne pouvait s’empêcher d’éprouver tout autant de surprise, ni même revenir de la stupéfaction qu’elles finissaient par provoquer.

Premièrement il était impossible de révoquer en doute la parenté de la demoiselle avec les fleurs auxquelles elle avait emprunté son nom. Car non-seulement aucun être au monde n’était capable