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Page:Hoffmann - Œuvres complètes, tome III.djvu/831

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aversion le jeune monsieur Brandstetter, et elle épousa enfin le conseiller de justice criminelle Mathesius de Marienwerder. Votre honneur peut se faire présenter à madame la conseillère à titre d’ancien ami. Marienwerder est beaucoup moins loin que la véritable Sorrente d’Italie. L’honorable dame doit être en bonne santé, et avoir déjà fait baptiser plusieurs petits enfants. »

Traugott s’enfuit muet et consterné. Ce dénouement l’accablait d’un horrible sentiment de dégoût. « Non ! s’écria-t-il, ce n’est pas elle, ce n’est pas Felicitas, cette image céleste qui a allumé dans mon cœur une passion infinie, et que j’avais toujours eu sans cesse devant les yeux comme mon étoile propice d’où émanaient en purs rayons les plus douces espérances. Felicitas, Felicitas, femme d’un conseiller criminelle, madame Mathesius ? ha !… ha !… madame Mathesius ! »

Plein d’un désespoir farouche, Traugott riait aux éclats. Il prit sa course vers la porte Oliva, et courut à travers Langfuhr jusqu’au Karlsberg. Il plongea ses regards sur Sorrente : les larmes lui jaillirent des yeux. « Ah ! s’écria-t-il, puissance suprême ! de quelles blessures profondes et incurables ta cruelle ironie ne rend-elle pas victimes les faibles créatures humaines ! — Mais non ! non ! pourquoi l’enfant porte-t-il sa main à la flamme pour se plaindre de la souffrance aiguë qu’il endure, au lieu de jouir paisiblement de la lumière et de la douce chaleur. La fatalité m’avait ensorcelé ; mon regard troublé méconnut les lois de la Providence céleste, et dans