Page:Hoffmann - Contes fantastiques,Tome 2, trad. Egmont, 1836.djvu/110

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mais il en est autrement du juge, accoutumé à arracher à une impudente hypocrisie son masque emprunté. Sans doute je ne suis pas tenu de dérouler à chacun de ceux qui m’interrogent la marche d’un procès criminel ! Je fais mon devoir, mademoiselle ! peu importe le jugement du monde. Il faut que les malfaiteurs tremblent devant la chambre ardente, qui n’applique d’autre châtiment que le fer et le feu. Mais je tiens à ne pas passer à vos yeux, honorable demoiselle, pour un monstre de rigueur et de cruauté. Permettez-moi donc de vous démontrer clairement et brièvement la culpabilité du jeune scélérat, qui, grâce au ciel ! n’a pu se soustraire à la vengeance publique. Alors votre esprit clairvoyant dédaignera de lui-même cette inspiration de bonté qui vous fait honneur, mais qui ne me siérait point assurément. — Écoutez !

» On trouve un matin Réné Cardillac tué d’un coup de poignard. Personne n’est auprès de lui, hors son apprenti Olivier Brusson et sa fille. En outre, dans la chambre d’Olivier on trouve un poignard récemment teint de sang et qui s’adapte exactement dans la blessure. Olivier dit : Cardillac a été tué dans la nuit, devant mes yeux. — Voulait-on le voler ? — Je n’en sais rien ! — Tu l’accompagnais, et tu n’as pas pu empêcher le meurtrier de frapper ? tu n’as pas pu l’arrêter ? crier au secours ? — Maître Réné me précédait, et je le suivais à quinze ou vingt pas de distance. — Pourquoi de si loin, au nom du ciel ? — C’était la volonté de mon maître. — Mais qu’avait à faire au bout du compte maître Cardillac si tard