Page:Hoffmann - Contes fantastiques,Tome 2, trad. Egmont, 1836.djvu/133

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je m’aperçois à peine qu’une escouade de maréchaussée m’a entouré. “Encore une victime de ces enragés ! — Héhé ! jeune homme ! que fais-tu là ? — es-tu un de leur bande ? Allons, marche !” C’est ainsi qu’ils m’apostrophèrent en me saisissant. Je puis à peine balbutier que j’étais absolument incapable de commettre une action aussi horrible, et qu’ils me laissent aller en paix. L’un d’eux alors m’éclaire le visage, et s’écrie en riant : “C’est Olivier Brusson, le compagnon orfèvre, qui travaille chez le brave et honnête maître Réné Cardillac ! — Ah, vraiment oui ! — c’est bien lui qui irait assassiner le monde dans la rue ! — il a bien l’air de cela : c’est bien l’habitude des assassins de rester à se lamenter près du cadavre, et de se laisser ainsi appréhender. — Comment cela s’est-il passé, jeune homme ? — Raconte hardiment !

» — À quelques pas devant moi, leur dis-je, un homme s’est précipité sur celui-ci, l’a renversé, et s’est enfui comme le vent, lorsque je me suis mis à crier, et moi j’ai voulu voir si l’homme frappé pouvait encore être secouru. — Non, mon fils, s’écrie l’un de ceux qui avaient relevé le cadavre, c’en est fait, c’est en plein cœur, comme à l’ordinaire, qu’a pénétré la lame du poignard. — Diable, dit un autre, nous sommes encore arrivés trop tard comme avant-hier.” À ces mots, ils s’éloignèrent en emportant le cadavre.

» Je ne saurais dire ce que j’éprouvai ; je consultai mes sens pour m’assurer qu’un mauvais rêve ne m’abusait pas ; il me semblait que j’allais me réveiller