Page:Hoffmann - Contes fantastiques,Tome 2, trad. Egmont, 1836.djvu/228

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La vie et le mouvement se réveillent soudainement en moi, je me lève et j’avance vivement de quelques pas. Mais là, je sens un courant d’air plus froid que la glace traverser la salle : au même instant, la lune projette un clair rayon sur un grand portrait d’homme d’une physionomie austère et presque terrible, et, comme un conseil donné par des voix faibles mais amicales, j’entends distinctement, au milieu du mugissement des vagues courroucées et malgré les sifflements aigus de l’aquilon, prononcer ces paroles : « Pas plus loin : — arrête-toi ! Sinon tu tombes sous l’empire des affreux mystères du monde invisible ! » Alors la porte est refermée avec autant de violence qu’auparavant, et je distingue parfaitement le bruit des pas dans l’antichambre ; on descend l’escalier, la grande porte du château s’ouvre avec fracas el puis se referme. En même temps il me semble qu’on fait sortir un cheval de l’écurie et qu’on l’y ramène au bout de quelques moments. — Et puis tout rentre dans le silence…

En cet instant, j’entendis mon grand-oncle soupirer et gémir avec anxièté dans la chambre voisine ; je retrouvai toute ma connaissance, je saisis le flambeau et j’entrai. Le vieillard paraissait se débattre contre l’oppression d’un songe pénible. « Réveillez-vous, réveillez-vous ! » m’écriai-je à haute voix en le prenant doucement par la main et en approchant de son visage la bougie allumée. Le vieillard se souleva avec un cri étouffé, et, me regardant fixement d’un air soulagé, il me dit : « Tu asbien fait, cousin, de m’avoir réveillé. Ah ! je faisais