Page:Hoffmann - Contes fantastiques,Tome 2, trad. Egmont, 1836.djvu/293

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particulière. On voit se fondre les brouillards du printemps et se dissiper les vapeurs de l’été ; ce n’est qu’à travers le pur éther de l’automne que se dessine nettement la perspective du paysage. Pour l’homme aussi, c’est à l’approche du sombre hiver des ans qu’une perception plus parfaite s’allie en lui à l’énergie de la volonté. Alors il nous est permis d’entrevoir en quelque sorte la terre promise où la mort doit nous faire aborder. — C’est ainsi qu’à présent s’éclaircit à mes yeux la destinée fatale de cette famille à laquelle m’attachent des liens plus forts que ceux même de la parenté. Tout cela se manifeste clairement à mon esprit, et la vérité se déroule devant moi complète et vivante ; mais ce que je vois, aucune langue humaine, pas plus que la mienne, ne serait capable de l’exprimer par des paroles. Écoute donc, mon fils, comme une histoire remarquable ce que je puis te raconter, et reconnais combien les relations mystérieuses auxquelles tu t’étais imprudemment mêlé, quoique la Providence t’y conviât peut-être, auraient pu te devenir funestes ! Mais… cela est passé ! »

Le récit que le vieillard me fit ensuite touchant le majorat de la famille de R*** est fixé si profondément dans ma mémoire, que je puis le rapporter ici presque dans les mêmes termes. — Mon grand-oncle y parlait de lui-même à la troisième personne.