Page:Hoffmann - Contes fantastiques,Tome 2, trad. Egmont, 1836.djvu/330

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vers l’entrée de la salle : bientôt, en effet, la porte fut ouverte, et un homme en déshabillé de nuit, le visage pâle et décomposé, entra lentement, portant d’une main un flambeau allumé, et de l’autre un gros trousseau de clefs.

V. reconnut aussitôt le vieil intendant, et il était sur le point de lui demander ce qu’il venait faire en ce lieu à une pareille heure ; mais tout dans la démarche du vieillard et dans ses traits horriblement contractés, lui fit pressentir quelque chose de mystérieux et de surnaturel. Il ne tarda pas à reconnaître que Daniel était somnambule. Celui-ci, traversant la salle à pas comptés, alla droit vers la porte murée qui conduisait autrefois à la tour. Là il s’arrêta et fit entendre un gémissement sourd et lugubre dont retentit la salle entière, au point que V. tressaillit d’une horreur secrète.

Alors Daniel posa sur le plancher son flambeau, suspendit les clefs à sa ceinture, et puis se mit à gratter contre le mur de ses deux mains si violemment, que le sang jaillissait de dessous les ongles. En même temps il poussait de profonds soupirs, comme un homme en proie au tourment inexprimable d’un mortel désespoir. Ensuite il prêta l’oreille contre le mur comme pour surprendre un bruit quelconque, et d’un signe de la main parut vouloir imposer silence à quelqu’un. Enfin il se baissa, reprit son flambeau, et regagna la porte à pas lents et comme à la dérobée.

V., muni d’une lumière, le suivit avec précaution. Le vieillard ayant descendu l’escalier, alla ouvrir