Page:Hoffmann - Contes fantastiques,Tome 2, trad. Egmont, 1836.djvu/336

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grondement sourd et singulier, supposant quelque accident arrivé chez le vieil intendant, se disposait à se lever pour courir à son secours, lorsque le concierge s’était mis à crier dans la cour d’une voix retentissante : « Au feu ! au feu ! tout est en flammes dans la chambre de monsieur l’intendant ! » À les cris, plusieurs domestiques accoururent, mais tous leurs efforts pour enfoncer la porte furent inutiles. Ils s’élancèrent alors dehors pour aviser à d’autres moyens ; mais déjà le brave concierge avait brisé la fenêtre de la chambre située au rez-de-chaussée et avait arraché les rideaux enflammés, que quelques seaux d’eau suffirent à éteindre à l’instant même.

On trouva l’intendant gisant évanoui au milieu de la chambre. Il tenait encore avec force dans sa main le chandelier dont la bougie avait mis le feu aux rideaux et déterminé l’incendie. Des morceaux de linge enflammés lui avaient brûlé les sourcils et une grande partie des cheveux. Si le concierge ne s’était pas apercu du feu, le vieillard aurait péri misérablement ; car les domestiques trouvèrent à leur grande surprise la porte de la chambre fermée intérieurement par deux énormes verrous, posés tout récemment, et que personne ne se rappelait avoir vus la veille.

V. comprit que Daniel avait voulu s’enlever à lui-même la faculté de sortir de sa chambre, mais que l’aveugle instinct du somnambule avait eu le dessus. Le vieillard tomba gravement malade : il ne parlait pas, prenait fort peu de nourriture, et. comme sous l’oppression d’une pensée funeste, ses