Page:Hoffmann - Contes fantastiques,Tome 2, trad. Egmont, 1836.djvu/398

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m’étaient tout à fait indifférents, non seulement me frappaient avec vivacité, mais me faisaient éprouver même d’indicibles tourments. C’est ainsi que j’avais conçu une telle horreur des lys, que je m’évanouissais à l’aspect de leurs fleurs, fussent-elles à une distance considérable ; car je voyais s’élancer de leurs blancs calices des petits basilics luisants, et qui dardaient leurs langues aiguës contre moi.

Mais comment, chère Adelgonde, te donner une idée même imparfaite de cet état singulier, auquel je ne pourrais pas donner le nom de maladie, s’il ne m’avait affaiblie progressivement au point que j’entrevoyais à la fin ma mort comme imminente. — Maintenant je veux te confier quelque chose de particulier : c’est ce qui a rapport à ma guérison. Je la dois à un excellent homme qu’Ottmar avait déjà introduit dans la maison, et qui, parmi tous les fameux et habiles médecins de la Résidence, est assurément le seul en possession du secret de guérir promptement et infailliblement une aussi étrange maladie que la mienne.

Mais ce qu’il y a de particulier, c’est que dans mes rêves et mes visions habituels je voyais constamment apparaître un bel homme, grave, qui, malgré sa jeunesse, m’inspirait une vénération profonde, et qui, sous divers costumes, mais toujours avec une robe traînante et une couronne de diamants sur la tête, jouait, dans le monde imaginaire de mes contes magiques, le rôle du roi romantique des esprits. Une liaison intime et tendre devait exister entre nous, car il me témoignait une affection