Page:Hoffmann - Contes fantastiques,Tome 2, trad. Egmont, 1836.djvu/399

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extrême, en retour de laquelle j’aurais donné ma vie. Tantôt il me faisait l’effet du sage roi Salomon, et d’autres fois, par une aberration inconcevable, je pensais malgré moi au Sarastro de la Flûte enchantée10, que j’ai vu représenter dans la capitale.

Hélas ! chère Adelgonde, juge de mon effroi lorsqu’au premier abord je reconnus dans Alban le roi romantique de mes rêves. — Alban est en effet ce médecin extraordinaire que bien antérieurement Ottmar avait amené une fois de la Résidence comme son ami de cœur, et qui néanmoins, pendant ce court séjour, avait si peu provoqué mon attention que je ne pouvais même pas ensuite me rappeler ses traits. Mais lorsqu’il revint, appelé pour me donner ses soins, il me fut impossible de définir l’étrange sensation dont son aspect me pénétra. Alban ayant en général dans sa physionomie, dans toutes ses manières une certaine dignité, je dirais presque quelque chose d’impératif qui l’élève au-dessus de son entourage, il me sembla, dès qu’il eut fixé sur moi son regard sérieux et perçant, que je devais me soumettre sans restriction à tout ce qu’il prescrivait, comme s’il lui suffisait de vouloir bien positivement ma guérison pour l’opérer.

Ottmar disait qu’on allait me traiter par le magnétisme, et qu’au moyen de certains procédés Alban devait me mettre dans un état d’exaltation et de sommeil factice, grâce auquel je concevrais moi-même exactement le caractère de ma maladie, et je préciserais la manière de me rétablir. Tu ne saurais croire, chère Adelgonde, quel sentiment extrême