Page:Hoffmann - Contes fantastiques,Tome 2, trad. Egmont, 1836.djvu/43

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Autant le souvenir de la première apparition du chevalier, en frappant l’esprit d’Angela, l’empêchait de conserver ses manières pleines d’amour et de confiance qui lui étaient familières pour son mari, autant celui-ci conçut de méfiance dans son âme pour sa femme, dont il attribuait la préoccupation à ce secret qu’elle lui avait dérobé et qui l’avait une fois remplie de trouble. Cette méfiance amena des scènes de mécontentement et des témoignages d’humeur qui offensèrent Angela. Par un singulier effet des retours de l’âme, elle sentit se ranimer en elle, avec l’image du malheureux Duvernet, le sentiment pénible de cet amour détruit pour toujours, auquel elle avait dû de si douces émotions. Enfin la mésintelligence des deux époux ne fit que s’accroître et en vint à ce point, que le chevalier, las de la simplicité régulière de sa vie et la trouvant insipide, éprouva un désir ardent de reparaître dans le monde.

La mauvaise étoile du chevalier reprit son influence. Ce qu’avaient commencé son ennui et son déplaisir intérieurs fut achevé par un homme pervers, qui avait été autrefois croupier à la banque du chevalier, et celui-ci, cédant à ses perfides insinuations, finit par trouver sa conduite puérile et ridicule, et par s’étonner d’avoir pu sacrifier à l’amour d’une femme les plaisirs d’une existence seule digne d’envie.

Peu de temps après, la banque du chevalier de Ménars réinstallée, brillait d’un plus riche éclat que jamais. Son bonheur ne s’était pas démenti ; les victimes se succédaient rapidement et l’or pleuvait sur