Page:Hoffmann - Contes fantastiques,Tome 2, trad. Egmont, 1836.djvu/71

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Et Henri-François de Montmorency, comte de Bouteville, duc de Luxembourg, pair et maréchal du royaume, ne fut pas lui-même à couvert des soupçons. Une instruction fut dirigée contre lui par la terrible chambre ardente. Il se constitua spontanément prisonnier à la Bastille, où la haine de Louvois et de La Reynie lui fit assigner un cachot large de six pieds, et plusieurs mois se passèrent avant qu’il fut clairement démontré que son crime prétendu était un acte fort excusable : il s’était fait tirer une fois son horoscope par Lesage.3

Il est positif qu’un zèle aveugle entraina le président La Reynie à des cruautés et à des actes arbitraires. La chambre ardente devint tout à fait un tribunal d’inquisition. Le soupçon le plus insignifiant motivait un emprisonnement rigoureux, et souvent on laissait au hasard le soin de démontrer l’innocence du prévenu sur le fait d’un crime entraînant la peine de mort. En outre, La Reynie était si laid de sa personne et si astucieux dans ses manières, qu’il suscita bientôt la haine des personnes mêmes que sa mission lui faisait un devoir de venger ou de protéger. La duchesse de Bouillon, à qui il demandait à l’audience si elle avait vu le diable, répondit : « Il me semble que je le vois en ce moment ! »


Pendant que le sang des coupables et des suspects coulait à flots sur la place de Grève, et que les empoisonnements mystérieux devenaient de plus en plus rares, une autre calamité se manifesta, qui répandit