Page:Hoffmann - Contes fantastiques,Tome 2, trad. Egmont, 1836.djvu/72

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dans Paris une nouvelle consternation. Une bande de filous semblait s’être organisée pour accaparer tous les bijoux précieux. Une riche parure à peine acquise ne tardait pas à disparaître d’une manière inconcevable, quelque soin qu’on mit à la garder ; mais ce qui était encore pire, c’est que tout individu qui osait porter le soir des bijoux avec lui, était volé et souvent même tué en pleine rue, ou dans les sombres allées des maisons.

Ceux qui n’y avaient pas laissé la vie racontaient qu’un coup de poing asséné sur la tête les avait renversés avec la violence de la foudre, et que, revenus de leur étourdissement, ils s’étaient trouvés volés et transportés dans un tout autre endroit que celui où ils avaient été surpris. Quant aux victimes des assassinats qui gisaient presque chaque matin dans la rue ou dans les maisons, tous étaient reconnaissables à la même blessure, un coup de poignard au cœur, dont l’effet mortel, au jugement des médecins, était si assuré et si immédiat que l’homme frappé devait tomber sans proférer un seul cri.

Or, quel seigneur de la cour galante de Louis XIV n’était pas engagé dans une intrigue d’amour, et n’avait pas l’occasion de se rendre de nuit chez sa maîtresse, en portant quelquefois avec lui un riche présent ? Les voleurs, comme s’ils eussent agi de concert avec l’esprit malin, savaient toujours exactement quand pareille chose devait arriver. Alors le malheureux n’atteignait pas la maison où il espérait savourer les joies de l’amour, ou bien il tombait au seuil même de la porte, à quelques pas de la chambre