On disait donc que Salvator Rosa avait pris part à cette œuvre sanguinaire, non moins ardent aux massacres du jour qu’assidu au travail nocturne. — Un célèbre critique, Taillasson je crois, apprécie bien notre maître, en disant : « Ses œuvres portent un caractère d’âpre fierté dans les idées et d’énergie bizarre dans l’exécution. La nature ne se révèle pas à lui dans l’aménité touchante des vertes prairies, des champs émaillés, des bosquets odorants, des sources murmurantes, mais dans l’effrayant spectacle des rochers gigantesques confusément entassés, ou des bords escarpés de la mer, ou des forêts sauvages et inhospitalières ; ce n’est point le doux bruissement des feuilles ni le chant plaintif du vent du soir, c’est le rugissement de l’ouragan, c’est le fracas de la cataracte qui ont une voix dont il s’émeuve. En contemplant ses déserts arides et les individus à mine étrange qu’il a peints rôdant, çà et là, tantôt seuls, tantôt en troupes, on se sent assiégé de pensées funèbres. Là, se dit-on, a été commis quelque meurtre affreux : là le cadavre ensanglanté fut lance dans le précipice…, et ainsi du reste. »2
Que tout cela soit vrai, que Taillasson ait même raison, quand il dit que le Platon de Salvator, que son saint Jean lui-même, annonçant dans le désert la naissance du Sauveur, ont un peu l’air de voleurs de grand chemin, la critique fût-elle juste, encore ne le serait-il pas de juger l’auteur d’après ses œuvres, et de croire que celui qui a doué de la vie des images terribles et sauvages doive lui-même avoir