Page:Hoffmann - Les Bijoux fatals ou Mademoiselle de Scudéri, Roman complet no 6, 1915.djvu/37

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sur le Pont-Neuf, avait jeté le billet et par conséquent celui qui avait apporté la cassette. Connaissant le meurtrier, tous les doutes avaient disparu aux yeux de Mlle de Scudéri, elle approuvait les soupçons de La Reynie et était convaincue qu’Olivier Brusson avait assassiné son maître. Jamais elle n’avait éprouvé une déception plus amère. À peine fut-elle arrivée dans son appartement que Madelon s’élança vers elle, se jeta à genoux, les mains croisées sur la poitrine en attachant sur elle des regards qu’on eût dit appartenir à un ange du ciel.

Mlle de Scudéri ne se laissa pas émouvoir cette fois par ces supplications, et d’une voix qu’elle cherchait autant que possible à rendre sévère :

— Va, dit-elle, il n’est plus temps de pleurer ; l’assassin subira le supplice qu’il mérite et que la sainte Vierge t’épargne à toi-même une accusation qui te menace à ton tour.

— Ah ! tout est perdu !

En poussant ce cri, Madelon tomba à la renverse évanouie et Mlle de Scudéri, la laissant aux soins de La Martinière, se retira dans une autre pièce.

Elle s’indignait d’avoir été un instant mêlée à toute cette trame et d’avoir été victime de tant de fourberies et elle se demandait pourquoi il était dans sa destinée, après avoir cru tant d’années à la vertu et à la loyauté, de voir dans sa vieillesse se ternir cette belle image de la bonne foi qui l’avait charmée toute sa vie. Elle entendit Madelon, entraînée par La Martinière s’exclamer :