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Page:Hoffmann - Les Bijoux fatals ou Mademoiselle de Scudéri, Roman complet no 6, 1915.djvu/44

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du ciel. Je suis maintenant aussi calme qu’il le faut pour vous raconter l’histoire de mes malheurs. Cette histoire est aussi terrible qu’incroyable. Ayez pitié de moi, et quel que soit l’horreur que puisse vous causer la découverte d’un mystère dont vous ne vous doutez pas, écoutez-moi jusqu’au bout et avec sang-froid. Hélas ! mon pauvre père n’aurait jamais dû quitter Paris, quand je songe aux premières années de notre séjour à Genève. Je vois toujours mon père et ma mère tristes et inconsolables. Je ne comprenais rien alors à la cause de leurs peines, mais plus tard je connus toute l’étendue de leur misère. Mon père, déçu dans toutes ses espérances, brisé par le chagrin, mourut au moment où je venais d’entrer comme apprenti chez un orfèvre. Ma mère ne cessait de parler de vous. À chaque instant elle prenait la résolution de tout vous écrire, puis le courage lui manquait. Quelques mois après la mort de mon père, elle le suivit dans la tombe. Mon maître était un homme exigeant et dur, me traitant avec la plus grande sévérité, bien que je fusse le meilleur de ses ouvriers. Et j’avais d’autant plus à souffrir de son caractère rigide et parfois injuste, que mon habileté surpassa bientôt la sienne. Un jour, un étranger entra dans notre atelier pour acheter quelques bijoux. Ses regards tombèrent sur un beau collier que je venais de finir ; il l’examina et l’admira.

— Jeune homme, dit-il, voilà un travail d’une perfection idéale, et je puis vous affirmer qu’il n’y a pas de meilleur orfèvre que