Page:Holbach - Système de la nature, 1770, tome 1.djvu/10

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Il eſt donc important de chercher à détruire des preſtiges qui ne ſont propres qu’à nous égarer. Il eſt tems de puiſer dans la nature des remedes contre les maux que l’Entouſiaſme nous a fait : la raiſon guidée par l’expérience doit enfin attaquer dans leur ſource des préjugés dont le genre humain fut ſi longtems la victime. Il eſt tems que cette raiſon, injuſtement dégradée, quitte un ton puſillanime qui la rendroit complice du menſonge, & du délire. La vérité eſt une ; elle eſt néceſſaire à l’homme, elle ne peut jamais lui nuire, ſon pouvoir invincible ſe fera ſentir tôt ou tard. Il faut donc la découvrir aux mortels ; il faut leur montrer ſes charmes afin de les dégoûter du culte honteux qu’ils rendent à l’erreur, qui trop ſouvent uſurpe leurs hommages ſous les traits de la vérité, ſon éclat ne peut bleſſer que les ennemis du genre humain, dont le pouvoir ne ſubſiſte que par la nuit obſcure qu’ils répandent ſur les eſprits.

Ce n’eſt point à ces hommes pervers que la vérité doit parler ; ſa voix n’eſt entendue que par des cœurs honnêtes, accoutumés à penſer, aſſez ſenſibles pour gémir des calamités ſans nombre que la Tyrannie religieuſe & politique fait éprouver à la terre ; aſſez éclairés pour appercevoir la chaîne immenſe des maux que l’erreur fit ſouffrir en tout tems aux humains conſternés. C’eſt à l’erreur que ſont dûes les chaînes accablantes que les Tyrans & les prêtres forgent partout aux nations. C’eſt à l’erreur qu’eſt dû l’Eſclavage où, preſqu’en tout pays, ſont tombés les peuples, que la nature deſtinoit à travailler librement à leur bonheur. C’eſt à l’erreur que ſont dues ces terreurs religieuſes qui font partout ſécher les hommes dans la crainte, ou s’égorger pour des chimeres. C’eſt à l’erreur