Page:Holbach - Système de la nature, 1770, tome 1.djvu/218

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mais libres ; elles sont toujours des suites nécessaires de leur tempérament, de leurs idées reçues, des notions vraies ou fausses qu’ils se font du bonheur, enfin de leurs opinions fortifiées par l’exemple, par l’éducation, par l’expérience journalière. Nous ne voyons tant de crimes sur la terre que parce que tout conspire à rendre les hommes criminels & vicieux ; leurs religions, leurs gouvernemens, leur éducation, les exemples qu’ils ont sous les yeux les poussent irrésistiblement au mal ; pour lors la morale leur prêche vainement la vertu, qui ne seroit qu’un sacrifice douloureux du bonheur dans des sociétés où le vice & le crime sont perpétuellement couronnés, estimés, récompensés, & où les desordres les plus affreux ne sont punis que dans ceux qui sont trop foibles pour avoir le droit de les commettre impunément. La société châtie les petits des excès qu’elle respecte dans les grands, & souvent elle a l’injustice de décerner la mort contre ceux que les préjugés publics qu’elle maintient ont rendus criminels.

L’homme n’est donc libre dans aucun instant de sa vie ; il est nécessairement guidé à chaque pas par les avantages réels ou fictifs qu’il attache aux objets qui excitent ses passions. Ces passions sont nécessaires dans un être qui tend sans cesse vers le bonheur ; leur énergie est nécessaire, puis qu’elle dépend de leur tempérament ; leur tempérament est nécessaire, puisqu’il dépend des élémens physiques qui entrent dans sa composition : les modifications de ce tempérament sont nécessaires, puisqu’elles sont des suites infaillibles & inévitables de la façon dont les êtres physiques & moraux agissent sans cesse sur nous.