Page:Holbach - Système de la nature, 1770, tome 1.djvu/44

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ceſſaire pour exercer leurs mouvemens, & qui de plus ſe trouve propre à ſe combiner avec eux. Ces élémens, que nos ſens ne nous montrent jamais purs, étant mis continuellement en action les uns par les autres, toujours agiſſant & réagiſſant, toujours ſe combinant & ſe ſéparant, s’attirant & ſe repouſſant, ſuffisent pour nous expliquer la formation de tous les êtres que nous voyons ; leurs mouvemens naiſſent ſans interruption les uns des autres ; ils ſont alternativement des cauſes & des effets, ils forment aiſsi un vaſte cercle de générations & de deſtructions, de combinaiſons & de décompoſitions, qui n’a pu avoir de commencement & qui n’aura jamais de fin. En un mot la nature n’eſt qu’une chaîne immenſe de cauſes & d’effets qui découlent ſans ceſſe les uns des autres. Les mouvemens des êtres particuliers dépendent du mouvement général, qui lui même eſt entretenu par les mouvemens des êtres particuliers. Ceux-ci ſont fortifiés ou affoiblis, accélérés ou retardés, ſimplifiés ou compliqués, engendrés ou anéantis par les différentes combinaiſons ou circonſtances qui changent à chaque moment les directions, les tendances, les loix, les façons d’être & d’agir des différens corps qui ſont mus. [1] Vouloir remonter au de là pour trouver le principe de l’action dans la matiere & l’origine des choſes, ce n’est jamais que reculer la difficulté, & la ſouſtraire absolument à l’examen de nos

  1. S’il étoit vrai que tout tendit à former une maſſe ſeule & unique, & ſi dans cette maſſe unique il arrivoit un inſtant que tout fût in niſu, tout reſteroit éternellement dans cet état, & il n’y auroit plus à toute éternité qu’une matiere & un effort, un Niſus, ce qui ſeroit une mort éternelle & univerſelle. Les phyſiciens entendent par Niſus l’effort d’un corps contre un autre corps ſans tranſlation locale ; or dans cette ſuppoſition il ne pourroit y avoir de cauſe de diſſolution & vu que ſuivant l’axiome des chymiſtes les corps n’agiſſent que lorſqu’ils font diſſous. Corpora non agunt niſi ſint ſoluta.