Page:Holbach - Système de la nature, 1770, tome 2.djvu/169

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tout ce qu’elle fait ne seroit jamais fortuit pour celui qui connoîtroit sa façon d’agir, ses ressources & sa marche. Tout ce qu’elle produit est nécessaire & n’est jamais qu’une suite de ses loix fixes & constantes ; tout en elle est lié par des nœuds invisibles, & tous les effets que nous voyons découlent nécessairement de leurs causes soit que nous les connoissions, soit que nous ne le connoissions pas. Il peut bien y avoir ignorance de notre part, mais les mots Dieu, esprit, intelligence etc. Ne remédieront point à cette ignorance ; ils ne feront que la redoubler en nous empêchant de chercher les causes naturelles des effets que nous voyons.

Cela peut servir de réponse à l’objection éternelle que l’on fait aux partisans de la nature, que l’on accuse sans cesse de tout attribuer au hazard. Le hazard est un mot vuide de sens, ou du moins il n’indique que l’ignorance de ceux qui l’employent. Cependant l’on nous dit & l’on nous répète qu’un ouvrage régulier ne peut être dû aux combinaisons du hazard. Jamais, nous dit-on, l’on ne pourra parvenir à faire un poëme tel que l’ iliade avec des lettres jettées ou combinées au hazard. Nous en conviendrons sans peine ; mais en bonne foi, sont-ce des lettres, jettées avec la main comme des dés, qui produisent un poëme ? Autant vaudroit-il dire que ce n’est point avec le pied que l’on peut faire un discours. C’est la nature qui combine d’après les loix certaines & nécessaires une tête organisée de manière à faire un poëme : c’est la nature qui lui donne un cerveau propre à enfanter un pareil ouvrage : c’est la nature qui par le tempérament, l’imagination, les passions qu’elle donne à un homme le met en état