il lui parle, il cherche à le gagner, il implore son assistance, il veut fléchir sa colère ; & pour y réussir il emploie les mêmes moyens dont il se serviroit pour appaiser ou gagner les êtres de son espèce.
Les sociétés dans leur origine, se voyant souvent affligées & maltraitées par la nature, supposèrent aux élémens ou aux agens cachés qui les régloient, une volonté, des vues, des besoins, des desirs semblables à ceux de l’homme. De là les sacrifices imaginés pour les nourrir, des libations pour les abbreuver, de la fumée & de l’encens pour repaître leur odorat. On crut que les élémens ou leurs moteurs irrités s’appaisoient, comme l’homme irrité, par des prières, par des bassesses, par des présens. L’imagination travailla pour deviner quels pouvoient être les présens & les offrandes les plus agréables à ces êtres muets, & qui ne faisoient point connoître leurs inclinations. On leur offrit d’abord les fruits de la terre, la gerbe ; on leur servit ensuite des viandes, on leur immola des agneaux, des genisses, des taureaux. Comme on les vit presque toujours irrités contre l’homme, on leur sacrifia peu-à-peu des enfans ; des hommes. Enfin le délire de l’imagination, qui va toujours en augmentant, fit que l’on crût que l’agent souverain qui préside à la nature dédaignoit les offrandes empruntées de la terre & ne pouvoit être appaisé que par le sacrifice d’un dieu. L’on présuma qu’un être infini ne pouvoit être réconcilié avec la race humaine que par une victime infinie.
Les vieillards, comme ayant le plus d’expérience, furent communément chargés de la réconci-