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Page:Holbach - Système de la nature, 1770, tome 2.djvu/225

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Il n’est point douteux qu’un dieu constamment bon, rempli de sagesse, orné de qualités aimables & favorables à l’homme ne soit une chimere plus séduisante que le dieu du fanatique & du superstitieux ; mais il n’en est pas moins une chimere, qui deviendra dangereuse, lorsque les spéculateurs qui s’en occuperont changeront de circonstances ou de tempérament ; ceux-ci le regardant comme l’auteur de toutes choses verront leur dieu changer, & seront au moins forcés de le regarder comme un être rempli de contradictions, sur lequel il n’est point sûr de compter ; dès lors l’incertitude & la crainte s’empareront de leur esprit, & ce dieu, que d’abord ils voyoient si charmant, deviendra pour eux un sujet de terreur, propre à les plonger dans la superstition la plus sombre dont ils sembloient d’abord infiniment éloignés.

Ainsi le théisme, ou la prétendue religion naturelle, ne peut avoir des principes sûrs, & ceux qui la professent sont nécessairement sujets à varier dans leurs opinions sur la divinité & sur la conduite qui en découle. Leur systême, fondé dans l’origine sur un dieu sage, intelligent, dont la bonté ne peut jamais se démentir, dès que les circonstances viennent à changer, doit bientôt se convertir en fanatisme & en superstition. Ce systême, médité successivement par des enthousiastes de différens caractères, doit éprouver des variations continuelles, & se départir très promptement de sa prétendue simplicité primitive. La plûpart des philosophes ont voulu substituer le théisme à la superstition, mais ils n’ont pas senti que le théisme étoit fait pour se corrompre & pour dégénérer. En effet des exemples frappans nous prouvent cette funeste vérité ; le théisme s’est