Page:Holbach - Système de la nature, 1770, tome 2.djvu/232

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fournit pour la rendre favorable. Les premiers partent d’une supposition fausse dont ils rejettent les conséquences nécessaires ; les autres admettent & le principe & les conséquences[1]. Un

  1. Un philosophe très-profond remarquait avec raison’ que le déisme devrait être sujet à autant d’hérésies et de schismes que la religion. Les déistes ont des principes communs avec les superstitieux, et ceux-ci ont souvent de l’avantage dans leurs disputes contre eux. S’il existe un Dieu, c’est-à-dire, un être dont nous n’avons aucune idée, et qui cependant a des rapports avec nous, pourquoi ne lui rendrions-nous pas un culte ? Mais quelle règle suivre dans le culte que nous devons lui rendre ? Le plus sûr sera de prendre le culte Je nos pères et de nos prêtres. Nous ne prendrons pas sur nous d’en chercher un autre ; ce culte est-il absurde ? il ne nous sera pas permis de l’examiner, Ainsi quelqu’absurde qu’il soit, le parti le plus sûr sera de nous y conformer, nous en serons quittes pour dire qu’une cause inconnue peut agir d’une façon inconcevable pour nous, que les vues de Dieu sont des abtrnes impénétrables, qu’il est très-expédient de s’en rapporter aveuglement à nos guides, que nous agirons très-sagement en les regardant comme infaillibles, etc. D’où l’on voit qu’un théisme conséquent peut conduire pas à pas à la crédulité la plus abjecte, à la superstition, et même au fanatisme le plus dangereux. Le fanatisme est-il donc autre chose qu’une passion peu raisonnée pour un être qui n’existe que dans l’imagination ? Le théisme est par. rapport à la superstition, ce que la réforme ou le protestantisme ont été par rapport à la religion romaine. Les réformateurs, révoltés de quelques mystères absurdes, n’en ont point constesté d’autres qui n’étaient pas moins révoltans. Dès que l’on peut admettre le dieu théologique, il n’est plus rien dans la religion que l’on ne puisse adopter. D’un autre côté, si nonobstant la réforme les protestans ont été souvent intolérans, il est à craindre que les théistes ne le soient de même j il est difficile de ne pas se fâcher en faveur d’un objet que l’on croit ties-important. Dieu n’est à craindre, que parce que ses intérêts troublent la société. ; Cependant on ne peut nier que le théisme pur, ou ce qu’on appelle la religion naturelle ne soit préférable à la superstition, de même que la réjorme a banni bien des abus des pays qui l’ont embrassée. Il n’y a qu’une liberté de penser illimitée et inviolable, qui puisse solidement assurer le repos des esprits. Les opinions des hommes ne sont dangereuses que lorsqu’on veut les gêner, ou quand on s’imagine être obligé de faire penser les autres comme on pense soimême. Nulle opinion, pas même celle de la superstition, ne serait dangereuse, si les superstitieux ne se croyaient pas en conscience obligés de persécuter, et n’en avaient pas le pouvoir : c’est ce préjugé que, pour le bien des hommes, il est essentiel d’anéantir, et, si la chose est impossible, l’objet que la philosophie puisse raisonnablement se proposer, sera de faire sentir aux dépositaires du pouvoir que jamais ils ne doivent permettre à leurs sujets de faire du.mal pour leurs opinions religieuses.