Page:Holbach - Système de la nature, 1770, tome 2.djvu/296

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tions, bien loin d’être utiles au genre humain, sont les vraies sources des maux qui affligent la terre, des erreurs qui l’aveuglent, des préjugés qui l’engourdissent, de l’ignorance qui la rend crédule, des vices qui la tourmentent, des gouvernemens qui l’opriment. Concluons, que les idées surnaturelles & divines qu’on nous inspire dès l’enfance, sont les vraies causes de notre déraison habituelle, de nos querelles religieuses, de nos dissensions sacrées, de nos persécutions inhumaines. Reconnoissons enfin, que ce sont ces idées funestes qui ont obscurci la morale, corrompu la politique, retardé les progrès des sciences, anéanti le bonheur & la paix dans le cœur même de l’homme. Qu’il ne se dissimule donc plus que toutes les calamités, pour lesquelles il tourne vers le ciel ses yeux noyés de larmes, sont dues aux vains phantômes que son imagination y a placés ; qu’il cesse de les implorer ; qu’il cherche dans la nature & dans sa propre énergie, des ressources que des dieux sourds ne lui procureront jamais. Qu’il consulte les desirs de son cœur, il saura ce qu’il se doit à lui-même & ce qu’il doit aux autres ; qu’il examine l’essence & le but de la société & il ne sera plus esclave ; qu’il consulte l’expérience il trouvera la vérité & il reconnoîtra que l’erreur ne peut jamais le rendre heureux[1].

  1. L’auteur du livre de la sagesse a dit avec raison, infandorum enim Idolorum cultura, omnis mali est causa et initium et finis. Vi Chap. XXVI, vers. 27. Il ne s’apercevait pas que son Dieu était une idole plus nuisible que toutes les autres. Au reste, il paraît que les dangers de la superstition ont été sentis par tous ceux qui ont pris vraiment a cœur les intérêts du genre humain : voilà, sans doute, pourquoi la philosophie, qui est le fruit de la réflexion, fut presque toujours en guerre ouverte avec la religion qui, comme on l’a fait voir, est le fruit de l’ignorance, de l’imposture, de l’enthousiasme, et de l’imagination.