Page:Holbach - Système de la nature, 1770, tome 2.djvu/311

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lé. J’ai consolé l’affligé : si les foiblesses de ma nature ont été nuisibles à moi-même ou incommodes aux autres, je n’ai du moins jamais fait gémir l’infortuné sous le poids de mes injustices, je n’ai point dévoré la substance du pauvre, je n’ai point vu sans pitié les larmes de la veuve ; je n’ai point écouté sans attendrissement les cris de l’orphelin. Si tu rendis l’homme sociable, si tu voulus que la société subsistât & fût heureuse, j’ai été l’ennemi de tous ceux qui l’opprimoient, ou la trompoient pour profiter de ses malheurs.

" si j’ai mal pensé de toi, c’est que mon entendement n’a pu te concevoir ; si j’ai mal parlé de toi, c’est que mon cœur trop humain s’est révolté contre le portrait odieux qu’on lui faisoit de toi. Mes égaremens ont été les effets du tempérament que tu m’avois donné, des circonstances, dans lesquelles sans mon aveu tu m’as placé, des idées qui malgré moi sont entrées dans mon esprit. Si tu es bon & juste, comme on l’assure, tu ne peux me punir des écarts de mon imagination, des fautes causées par mes passions, suites nécessaires de l’organisation que j’avois reçue de toi. Ainsi, je ne puis te craindre, je ne puis redouter le sort que tu me prépares. Ta bonté n’eût point permis que je pusse encourir des châtimens par des égaremens inévitables. Que ne me refusois-tu le jour, plutôt que de m’appeller au rang des êtres intelligens pour y jouir de la fatale liberté de me rendre malheureux ? Si tu me punissois avec rigueur & sans fin, pour avoir écouté la raison que tu m’avois donnée : si tu me châtiois