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Page:Holbach - Système de la nature, 1770, tome 2.djvu/330

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ce qui est simple & facile à comprendre, peu instruit dans les voies de la nature, accoutumé à ne point faire usage de la raison, le vulgaire d’ âge en âge se prosterne devant les puissances invisibles qu’on lui fait adorer. Il leur adresse ses vœux fervens, il les implore dans ses malheurs, il se dépouille pour elles du fruit de son travail, il est sans cesse occupé à remercier de vaines idoles des biens qu’il n’en a pas reçus, ou à leur demander des faveurs qu’il n’en peut obtenir. Ni l’expérience ni la réflexion ne peuvent le désabuser ; il ne s’apperçoit pas que ses dieux ont toujours été sourds ; il s’en prend à lui-même, il les croit trop irrités, il tremble, il gémit, il soupire à leurs pieds, il couvre leurs autels de présens, il ne voit pas que ces êtres si puissans sont soumis à la nature, & ne sont jamais propices que quand cette nature est favorable. C’est ainsi que les nations sont complices de ceux qui les trompent, & sont aussi opposées à la vérité que ceux qui les égarent.

En matière de religion il est très-peu de gens qui ne partagent, plus ou moins, les opinions du vulgaire. Tout homme qui s’écarte des idées reçues, est généralement regardé comme un frénétique, un présomptueux qui se croit insolemment bien plus sage que les autres. Au nom magique de religion & de divinité, une terreur subite & panique s’empare des esprits ; dès qu’on les voit attaqués la société s’allarme, chacun s’imagine voir déjà son monarque céleste lever son bras vengeur contre le pays où la nature rébelle a produit un monstre assez téméraire pour braver son courroux. Les personnes mêmes les plus modérées taxent de folie & de sédition celui qui ose contester à ce souverain imaginaire des droits que