Page:Holbach - Système de la nature, 1770, tome 2.djvu/333

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& les combinaisons ont produit tous les êtres, sont, sans doute, des causes plus réelles que le dieu de la théologie. Ainsi, pour parler exactement, ce sont les partisans d’un être imaginaire, contradictoire, impossible à concevoir, que l’esprit humain ne peut saisir par aucun côté, qui n’offre qu’un vain nom, dont on peut tout nier, dont on ne peut rien affirmer ; ce sont, dis-je, ceux qui font d’une pareille chimere le créateur, le moteur, le conservateur de l’univers, qui sont des insensés. Des rêveurs, incapables d’attacher aucune idée positive à la cause dont ils parlent sans cesse, ne sont-ils pas de vrais athées ? Des penseurs qui font du pur néant la source de tous les êtres, ne sont-ils pas de vrais aveugles ? N’est-ce pas le comble de la folie de personnifier des abstractions ou des idées négatives, & de se prosterner ensuite devant la fiction de son propre cerveau ?

Ce sont néanmoins des hommes de cette trempe qui règlent les opinions du monde, & qui défèrent à la risée & à la vengeance publique des hommes plus sensés qu’eux. à en croire ces profonds rêveurs, il n’y a que la démence & la frénésie qui puissent faire rejetter dans la nature un mobile totalement incompréhensible. Est-ce donc un délire de préférer le connu à l’inconnu ? Est-ce un crime de consulter l’expérience, d’en appeller au témoignage des sens dans l’examen de la chose la plus importante à connoître ? Est-ce un affreux attentat de s’adresser à la raison, & de préférer ses oracles aux décisions sublimes de quelques sophistes, qui conviennent eux-mêmes qu’ils ne comprennent rien au dieu qu’ils nous annoncent ? Cependant, selon eux, il n’est point