tême qui d’un homme honnête ne fera point un méchant homme & qui d’un méchant homme ne fera pas un homme de bien. " Ceux, dit le même auteur, qui avoient embrassé la secte d’épicure n’étoient pas devenus débauchés, parce qu’ils avoient embrassé la doctrine d’épicure, mais ils n’avoient embrassé la doctrine d’épicure, mal entendue, que parce qu’ils étoient débauchés.[1] " de même un homme pervers peut embrasser l’athéisme parce qu’il se flattera que ce systême mettra ses passions en pleine liberté ; il se trompera néanmoins ; l’athéisme bien entendu est fondé sur la nature & la raison, qui jamais, comme la religion, ne justifieront & n’expieront les crimes des méchans.
De ce qu’on a fait dépendre la morale de l’existence & de la volonté d’un dieu, que l’on proposa pour modèle aux hommes, il résulta, sans doute, un très grand inconvénient. Des ames corrompues, venant à découvrir combien toutes ces suppositions sont fausses ou douteuses, lâchèrent la bride à tous leurs vices, conclurent qu’il n’y avoit point de motifs plus réels pour faire le bien, s’imaginèrent que la vertu, comme les dieux, n’étoit qu’une chimere, & qu’il n’y avoit point en ce monde de raison pour la pratiquer. Cependant il est évident que ce n’est point comme créatures d’un dieu que nous sommes tenus de remplir les devoirs de la morale ; c’est comme hommes, comme des êtres sensibles vivans en société & cherchans à se conserver dans une exi-
- ↑ Voyez Bayle, Pensées diverses, § 177. Sénèque avait dit avant lui : Ita non ab Epicuro impulsi luxuriantur, sed vitiis dediti, luxuriam suam in philosophia sinu abscondunt. V. SENEC. DE VITÂ BEATÂ CAP. XII.