Page:Holbach - Système de la nature, 1770, tome 2.djvu/356

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stence heureuse, que la morale nous oblige. Soit qu’il existe un dieu, soit qu’il n’en existe point, nos devoirs seront les mêmes ; & notre nature consultée nous prouvera que le vice est un mal & que la vertu est un bien réel[1].

Si donc il s’est trouvé des athées qui aient nié la distinction du bien & du mal, ou qui aient osé sapper les fondemens de toute morale, nous devons en conclure que sur ce point ils ont trés mal raisonné, qu’ils n’ont point connu la nature de l’homme, ni la vraie source de ces devoirs ; qu’ils ont faussement supposé que la morale, ainsi que la théologie, n’étoit qu’une science idéale,

  1. On assure qu’il s’est trouvé des philosophes et des athées qui ont nié la distinction du vice et de la vertu, et qui ont prêché la débauche et la licence dans les mœurs : l’on peut mettre dans ce nombre Aristippe, Théodore, surnommé l’athée, Bîon le Borysténite, Pjrrhon, etc., parmi les anciens (V. Diogène Laërce) et parmi les modernes l’auteur de la fable des Abeilles, qui pourtant pourrait ne s’être proposé que de faire sentir que la présente constitution des choses, les vices se sont identifiés avec les nations et leur sont devenus nécessaires, de même que les liqueurs fortes à un palais usé. L’écrivain qui a publié l’homme machine a raisonné sur les mœurs comme un vrai frénétique. Si ces auteurs eussent consulté sur la morale, comme sur la religion, ils auraient trouvé que bien loin de conduire au vice et a la dissolution, elle conduit à la vertu. Nunquam aliud Natura, aliud Sapientia dicit.

    JUVENAX SATYR. l4, V. 321.

    Malgré les prétendus dangers que tant de personnes croient voir dans l’athéisme, l’antiquité n’en a pas porté un juge-* ment si défavorable. Diogène Laërce nous apprend qu’Épicure était d’une bonté incroyable, que sa patrie lui fit ériger des statues, qu’il eut un nombre prodigieux d’amis, que son école subsista très-long-temps. V. Diogène Laërt. X. gi Cicéron, quoiqu’enneini des opinions épicuriennes, rend un témoignage éclatant à la probité d’Epicure et de ses disciples, qui étaient remarquables par l’amitié qu’ils avaient les uns pour les autres. V. Cicero de finibus II, 25. La philosophie d’Epicure fut enseignée publiquement a Athènes pendant plusieurs siècles, et Lactance dit qu’elle fut la plus suivie. Epicuri disciplina mullo celebrior semperfuit quam cœlerorum. V. Institut divin. III, 17. Du temps de Marc-Aurèle il y avait à Athènes un professeur public de la philosophie d’Epicure, payé par cet empereur, qui était Stoïcien.