Page:Holbach - Système de la nature, 1770, tome 2.djvu/358

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prenne les moyens nécessaires pour jouir paisiblement d’une vie exempte d’allarmes & de remords. L’homme doit quelque chose à l’homme, non parce qu’il offenseroit un dieu, s’il nuisoit à son semblable, mais parce qu’en lui faisant injure il offenseroit un homme, & violeroit les loix de l’équité, au maintien desquelles tout être de l’espèce humaine se trouve intéressé.

Nous voyons tous les jours des personnes qui à beaucoup de talens, de connoissances & de pénétration joignent des vices honteux & un cœur très corrompu : leurs opinions peuvent être vraies à quelques égards & fausses à beaucoup d’autres ; leurs principes peuvent être justes, mais les inductions qu’ils en tirent sont souvent fautives & précipitées. Un homme peut avoir en même tems assez de lumières pour se détromper de quelques-unes de ses erreurs & trop peu de forces pour se défaire de ses penchans vicieux. Les hommes ne sont que ce que les fait leur organisation, modifiée par l’habitude, par l’éducation, par l’exemple, par le gouvernement, par les circonstances durables ou momentanées. Leurs idées religieuses & leurs systêmes imaginaires sont forcés de céder ou de s’accommoder à leurs tempéramens, à leurs penchans, à leurs intérêts. Si le systême que s’est fait un athée ne lui ôte point les vices qu’il avoit auparavant, il ne lui en donne point de nouveaux. Au lieu que la superstition fournit à ses sectateurs mille prétextes pour commettre le mal sans remords, & même pour s’en applaudir. L’athéisme du moins laisse les hommes tels qu’ils sont ; il ne rendra point plus intempérant, plus débauché, plus ambitieux, plus cruel un homme que son tempérament n’invite point