Page:Holbach - Système de la nature, 1770, tome 2.djvu/397

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médiocres sont à portée de s’appercevoir très promptement des absurdités grossières de la religion, mais que peu accoutumés à méditer, ou dépourvus de principes sûrs qui servent à les guider, leur imagination les remet bientôt dans le labyrinthe théologique, d’où une raison trop foible sembloit vouloir les tirer. Des ames timides craignent même de se rassûrer ; des esprits accoutumés à se payer des solutions théologiques ne voient plus dans la nature qu’une énigme inexplicable, qu’un abîme impossible à sonder. Habitués à fixer leurs yeux sur un point idéal & mathématique qu’ils ont fait le centre de tout, l’univers se confond pour eux dès qu’ils le perdent de vue ; & dans le trouble où ils se trouvent ils aiment mieux revenir aux préjugés de leur enfance, qui semblent leur expliquer tout, que de flotter dans le vuide, ou de quitter le point d’appui qu’ils jugent inébranlable. Ainsi la proposition de Bacon ne semble indiquer rien, sinon que les personnes les plus habiles ne peuvent se défendre des illusions de leur imagination, dont l’impétuosité résiste aux raisonnemens les plus forts.

Cependant une étude réfléchie de la nature suffit pour détromper tout homme qui pourra regarder les choses d’un œil tranquille : il verra que dans l’univers tout est lié par des chaînons invisibles, pour l’observateur ou superficiel ou trop bouillant, mais très sensibles pour celui qui voit les choses de sang froid. Il trouvera que les effets les plus rares, les plus merveilleux, ainsi que les plus petits & les plus ordinaires, sont également inexplicables, mais doivent découler de causes naturelles, & que des causes surnaturelles, sous quelque nom qu’on les désigne, de quelques qua-