Page:Holbach - Système de la nature, 1770, tome 2.djvu/413

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dont le suffrage vaut bien mieux que celui de la multitude égarée. Cependant si tu portes tes regards au dehors, des visages contens t’exprimeront la tendresse, l’intérêt, le sentiment. Une vie dont chaque instant sera marqué par la paix de ton ame, & l’affection des êtres qui t’environnent, te conduira paisiblement au terme de tes jours ; car il faut que tu meures ; mais tu te survis déjà par la pensée ; tu vivras toujours dans l’esprit de tes amis, & des êtres que tes mains ont rendu fortunés ; tes vertus y ont d’avance érigé des monumens durables. Si le ciel s’occupoit de toi, il seroit content de ta conduite, quand la terre en est contente.

" Garde toi donc de te plaindre de ton sort. Sois juste, sois bon, sois vertueux & jamais tu ne peux être dépourvu de plaisir. Garde toi d’envier la félicité trompeuse & passagère du crime puissant, de la tyrannie victorieuse, de l’imposture intéressée, de l’équité vénale, de l’opulence endurcie. Ne sois jamais tenté de grossir la cour, ou le troupeau servile des esclaves de l’injuste tyran. Ne tente point d’acquérir à force de honte, d’avanies & de remords le fatal avantage d’opprimer tes semblables ; ne sois point le complice mercénaire des oppresseurs de ton pays ; ils sont forcés de rougir, dès qu’ils rencontrent tes yeux.

" Car, ne t’y trompe pas, c’est moi qui punis, plus sûrement que les dieux, tous les crimes de la terre ; le méchant peut échapper aux loix des hommes, jamais il n’échappe aux miennes. C’est moi qui ai formé & les cœurs & les